-
Mon coup de coeur : Je vous écris dans le noir [Jean-Luc Seigle]
Dans ce roman en trois cahiers, Jean-Luc Seigle retrace l'histoire de Pauline Dubuisson, condamnée à l'âge de 21 ans pour le crime de son ex fiancé Félix.
Il s'approprie l'histoire en utilisant la première personne du singulier.
Dans cette œuvre délicieusement bien écrite et d'une rare profondeur, il va nous narrer les silences de sa vie et de son enfance.
L'histoire débute alors que Pauline est installée au Maroc. Elle a fui sa vie après neuf ans de détention et se prénomme désormais Andrée en hommage à son père auquel des liens très fort d'amour l'unissait. Elle parlera même d'« esclavage affectif ». Son suicide à l'occasion de son procès laissera place à une culpabilité omniprésente dans la vie de Pauline.
L'adaptation cinématographique de son procès, dans le film La vérité, où Brigitte Bardot jouera le rôle de la meurtrière, sera à l'origine de sa fuite « infernale, éperdue » pour « échapper à ce destin qui la débusquait sans cesse ».
Là-bas, elle est rencontrera Jean. C'est pour elle une « renaissance », l'occasion de commencer une nouvelle vie mais sa demande en mariage va faire ressurgir le passé. Par souci d'honnêteté, elle va s'ouvrir à lui et lui avouer son histoire.
Avec des mots percutants et puissants, elle va se mettre à nu dans le deuxième cahier. L'épisode du viol collectif, « l'insupportable », qu'elle a subi à la Libération, est relaté avec des mots d'une extrême violence, qui font froid dans le dos !
J'ai pour ma part été extrêmement touchée par le ton de ce roman qui fait formidablement bien ressortir la « violence inimaginable » dont elle a été victime.
L'auteur donne un nouvel éclairage au procès de cette femme en mettant en lumière ce qui a été tu et a fait d'elle une meurtrière qui a tué de sang-froid. « C'était les mots qu'elle voulait tuer, les mots qui salissent et qui blessent » et non Félix, qui était toute sa vie de la même façon que Jean deviendra sa raison de vivre. Mais l'annonce de la vérité à Jean aura les mêmes conséquences qu'avec Félix.
Elle va de nouveau se retrouver dans le noir. Elle dira à ce propos : « une apocalypse bien plus qu'une éclipse ». et aboutira à sa mort, avec un dernier paragraphe aux phrases courtes, très ponctuées, commençant pour la plupart par des verbes à l'infinitif. La vie pour elle n'est plus qu'un état de fait dont elle est étrangère.
Je vous écris dans le noir de Jean-Luc Seigle par web-tv-culture
Tags : Je vous ecris dans le noir, seigle, roman, pauline dubuisson, vie, histoire, mots, noir
-
Commentaires